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IEI
Institut Européen et International
Croissance mondiale et libre-échange : dynamiques actuelles
Jean-Marc Daniel est économiste et professeur à ESCP Europe.
Malgré l’embellie que connaît actuellement le commerce mondial, le retour des discours protectionnistes depuis 2008 menace le futur du libre-échange. Comment analysez-vous ce rejet du libre-échange qui se manifeste dans la politique économique de certains États (États-Unis, Grande-Bretagne) ?
Ce qui est frappant, et relativement nouveau, c’est que la puissance dominante, à savoir les Etats-Unis, s’assume en leader des protectionnistes. Le retour en grâce des thèses protectionnistes tient à ce que les opinions publiques associent libre-échange et délocalisation, puis délocalisation et désindustrialisation, même si les pertes d’emplois industriels tiennent plus à la robotisation qu’aux délocalisations. A la fin du XIXe siècle, ce genre d’équations fallacieuses appliquées à l’agriculture avait déjà conduit au protectionnisme, un protectionnisme incarné en France par Jules Méline.
Depuis la crise de 2008, la reprise de l’économie mondiale reste incertaine. Pensez-vous que le libre-échange puisse sauver l’économie ?
2008 a été une crise cyclique semblable à celles de 1974/1975 ou 1992/1993, même si chacun de ces retournements conjoncturels a des facteurs aggravants spécifiques (le choc pétrolier dans les années 70, le laxisme financier en 2008). Le problème est que, de cycle en cycle, chaque reprise est moins forte que la précédente. La croissance potentielle, c'est-à-dire la croissance indépendante des soubresauts, ne cesse de reculer. En France, nous sommes passés de 5% dans les années 60 à 1,3% aujourd’hui. Ce ralentissement touche tous les pays développés, qui ont en commun d’être proches de ce qu’on appelle la « frontière technologique ». Mais il y a des pays dont la croissance potentielle reste forte parce qu’ils sont en phase de rattrapage. La libre circulation des capitaux leur permet d’accéder aux technologies les plus performantes et la libre circulation des marchandises permet aux pays développés d’y trouver de nouveaux débouchés : la croissance mondiale est doublement gagnante.
De 1985 à 2014, la croissance du commerce mondial a été plus importante que la croissance de l’économie mondiale. Ce n’est plus le cas aujourd’hui puisque le taux de croissance des échanges mondiaux est maintenant inférieur au taux de croissance de l’économie mondiale. Le libre-échange est-il de moins en moins dynamique ?
Les excédents commerciaux de certains pays (Chine, Allemagne) sont souvent considérés comme une atteinte aux intérêts nationaux de leurs partenaires commerciaux. Pensez-vous que les excédents commerciaux nuisent à l’économie globale ?
Quelle est selon vous la place de l’Europe, à la fois dans le commerce mondial et dans l’économie mondiale ?